Diffusion d'extraits de films dans le cadre d'une exposition payante

Réponse de l'Enssib

Date de la réponse

Dans le cadre d'une exposition payante, vous aimeriez utiliser des extraits de films, dessins-animés, et vidéos d'archive pour en faire un montage vidéo qui tournerait en boucle dans votre espace scénographique. Vous aimeriez savoir quelles sont vos possibilités d’un point de vue légal.


 

Cadre général

Au terme de l'article L122-4 du Code de la propriété intellectuelle :  

 

Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

 

Le montage vidéo que vous souhaitez réaliser à partir d’extraits de film implique le droit de représentation (nouvelle communication de l’œuvre via vos écrans) et de reproduction (nouvelle fixation matérielle de l’œuvre via le montage). Dans les deux cas, il s’agit du droit patrimonial.

 

Le droit patrimonial est limité dans le temps, 70 ans après la mort du dernier auteur vivant, dans le cas d’une œuvre de collaboration (auteur du scénario, auteur de l'adaptation, auteur du texte parlé, auteur de la musique et le réalisateur). Si cette durée est dépassée, l’œuvre tombe dans le domaine public. Vous pouvez alors la reproduire ou la communiquer sans avoir besoin d’en demander l’autorisation aux auteur ou leurs ayants droit. Vous devrez néanmoins respecter le droit moral qui lui est perpétuel :

  • citer l’auteur (droit de paternité)

  • respecter l’intégrité de l’œuvre

 

Si l’œuvre est encore sous le droit patrimonial d’auteur, qu’elle n’est pas sous licence creative commons et que votre utilisation n’entre pas dans le cadre des exceptions prévues au droit d’auteur (Article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle), vous avez besoin de l’autorisation des auteurs (par le biais du producteur pour un film, qui récupère par cession les droits des différents auteurs, que nous vous recommandons de contacter).

 

Elle doit préciser la durée, le territoire, l’étendue et la destination des droits cédés (Cession de droits d’auteur, site Freelancer)


 

Exception courte citation

Comme nous le développions dans cette précédente réponse, Diffusion extraits de film dans une vidéo en ligne (30/03/2021) :

 

Pour avoir le droit de citer gratuitement un extrait audiovisuel (reportage, émission, film) dans un autre film (ou dans une exposition, un spectacle, un DVD), il faut que la citation d'extrait soit brève, qu'elle soit justifiée "par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l’œuvre" à laquelle est incorporé l'extrait, et il faut indiquer la source de l'extrait (CPI art. L. 122-5 et 211-3).
Dès lors que l'utilisation d'extraits audiovisuels ne répond pas à ces trois critères cumulatifs, les conditions de la citation ne sont pas remplies. L'utilisateur doit alors demander l'accord des personnes détenant des droits sur les extraits, et les rémunérer.

Source : Guide pratique du droit d'auteur. Anne-Laure Stérin. Maxima, 2011, page 413

 

De plus cette exception a été interprétée de manière restrictive par la jurisprudence. Seules les citations textuelles sont autorisées, ce qui exclut de fait l’image fixe, la vidéo et l’audio.

 

À ce jour, les tribunaux interprètent l’exception de citation de façon restrictive, en la limitant aux œuvres textuelles (alors que la loi ne distingue pas selon la nature de l’œuvre et permet a priori de faire des citations de textes, mais aussi d’images, de documents audiovisuels ou sonores). Il est possible que la jurisprudence évolue sur ce point dans les années à venir. Mais pour l’instant, il est prudent de n’invoquer l’exception de citation que pour les textes, et d’obtenir les autorisations nécessaires avant d’utiliser un extrait de film, de musique ou d’image fixe.

Source :Véronique Ginouvès, Le chercheur veut utiliser un extrait d’une œuvre (exception de citation), Carnet de recherche éthique et droit sur Hypothèses, 26 juillet 2017

 

Concernant la tolérance de ces usages, elle est plus grande dans le cas de services gratuits.

 

Il vous appartient d'évaluer le risque juridique. En effet, dans un article intitulé "Faut-il respecter le droit en bibliothèque ?", Lionel Maurel déplore que la prise de risque juridique ne soit pas assez "ancrée dans la culture professionnelle en France, alors qu’elle fait partie intégrante du processus de décision dans les pays anglo-saxons".

Source: Faut-il respecter le droit en bibliothèque ? Lionel Maurel. Bulletin des bibliothèques de France, n° 3, 2011

 

Veuillez noter que cette réponse n’a pas de valeur juridique.

 

 

Pour aller plus loin :