Création et diffusion de livre audios lus et enregistrés (Œuvre complète existante) par des élèves de collège

Réponse de l'Enssib

Date de la réponse

Dans le cadre d’un atelier d'enregistrement de livres audio au sein de votre établissement scolaire, vous souhaitez savoir ce qu'il en est en termes de droit quant à l'enregistrement audio d'une œuvre littéraire complète existante, de la voix des élèves et de sa diffusion dans le cadre de l'établissement scolaire (CDI).


 

Vous avez déjà consulté :

 

Avant toute chose, nous tenons à préciser que nous ne sommes pas un service juridique et qu’en conséquence notre réponse ne peut se prévaloir d’une telle valeur.

1) Oeuvre composite

L’enregistrement audio d’une œuvre préexistante (album, poème, roman...) est une œuvre dite composite, cela signifie que plusieurs œuvres sont imbriquées en une seule :

  • première œuvre : l’œuvre source dont vous souhaitez faire l’enregistrement
  • seconde œuvre : l’audio sur lequel la lecture à voix haute de la première œuvre a été enregistrée

 

Il faut donc examiner les droits impliqués par les deux œuvres.

Source : Fiche 3 - La pluralité d’auteurs. Ministère de l’Éducation nationale, Hadopi

2) Autorisation pour l’enregistrement audio de la première œuvre

En droit :

Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

Source : Article L122-4 du Code de la propriété intellectuelle

 

Enregistrer sur un nouveau support une œuvre est une reproduction, qui relève du droit patrimonial de l’auteur. 

 

Le droit patrimonial est limité dans le temps. Il dure pendant toute la vie de son auteur et jusqu’à 70 ans après sa mort (Anne-Laure Stérin, « Le point sur le droit d’auteur », Carnet de recherche éthique et droit sur Hypothèses, 12 février 2016).

 

Si cette durée est dépassée, l’œuvre tombe dans le domaine public. Il est alors possible de la reproduire ou de la communiquer sans avoir besoin d’en demander l’autorisation à l’auteur ou ses ayants droit.

 

Le droit moral qui lui est perpétuel reste à respecter :

  • citer l’auteur (droit de paternité)
  • respecter l’intégrité de l’œuvre

 

Si les romans jeunesse que vous envisagez d’enregistrer en audio ne sont pas tombés dans le domaine public ou ne sont pas placés sous licence creative commons, il est nécessaire de contacter les éditeurs des œuvres, qui ont récupéré par cession les droits des auteurs. 

Il vous appartiendra de définir avec eux la durée, le territoire, l’étendue et la destination des droits cédés (Cession de droits d’auteur, site Freelancer). Pour garder traces de vos échanges et que ceux-ci aient valeur contractuelle, un échange mail a minima est nécessaire.

 

Il existe des exceptions au droit d’auteur, notamment l’exception pédagogique (Article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle), mais selon nous vous n’entrez pas dans ce cadre. Les conditions sont restrictives : « L’exception pédagogique et de recherche », Anne-Laure Stérin. Carnet de recherche éthique et droit sur Hypothèses, 26/07/2017

3) Droits d’auteur de la seconde œuvre : l’enregistrement audio

L’enregistrement audio met en jeu deux droits voisins du droit d’auteur :

  • Le droit du producteur du phonogramme : en l’occurrence vous, donc pas de difficulté sur ce point (« Le point sur le droit voisin des producteurs », Anne-Laure Stérin. Carnet de recherche éthique et droit sur Hypothèses, 7 février 2016).

     

  • Le droit des interprètes : ici les élèves, dont il vous faudra l’autorisation des représentants légaux :

Toute utilisation de la voix d'un élève suppose, dès sa captation, que les autorisations ont été signées par les représentants légaux de l'enfant.

[…]

L’autorisation doit contenir :

  • Nom et prénom de la personne photographiée ou filmée [ici enregistré] ;
  • Nom et prénom de la personne à qui est donnée l’autorisation ;
  • La destination des images, sons ou vidéos (site Internet, diaporama, DVD…) et le cadre d’utilisation (article d’information, illustration d’un travail de classe, journal en ligne…) ;
  • Le caractère gratuit ou non de l’autorisation ;
  • La durée de l’autorisation.

Source: Diffuser l'image ou la voix d'une personne : quelles autorisations et combien de temps ? Site de l’académie de Paris, octobre 2025

4) Autorisation pour la diffusion de l’œuvre enregistrée

Nous comprenons que vous souhaitez mettre à disposition dans votre CDI les enregistrements sous la forme d’accès à des lecteurs MP3.

 

La diffusion de l’œuvre composite implique l’autorisation de tous les auteurs et ayants droit évoqués précédemment. Il s’agit en effet d’une nouvelle communication de l’oeuvre qui relève du droit patrimonial de l’auteur.

 

Il vous faut donc :

  • l’accord des élèves (interprètes). Cela peut être spécifié en même temps que l’autorisation d’enregistrement
  • l’accord du producteur du phonogramme (vous)
  • l’accord de l’auteur de la première œuvre (son éditeur par cession). Cela peut-être demandé en même temps que l’autorisation d’enregistrement : c’est à la fois une nouvelle reproduction (enregistrement audio de l’oeuvre papier) et une nouvelle communication (diffusion de l’œuvre au public d’un CDI).

5) Livre-audio : accord de la Sofia ?

Nous comprenons que vous n’envisagez pas le prêt de ces lecteurs MP3 où seront enregistrées les œuvres composites, mais leur consultation sur place. Cela dit même si vous choisissiez de les prêter, le statut particulier des livres-audio vous dispense d’une déclaration à la Sofia :

Sont assujettis au droit de prêt mais temporairement exclus de recouvrement et donc de déclaration :


• les livres d’occasion (ouvrages qui ont déjà été achetés une fois par un consommateur final et qui ont été revendus à un détaillant, un grossiste ou un soldeur...),
• les soldes totaux (ouvrages retirés de l’ensemble des circuits de diffusion, supprimés des catalogues de l’éditeur et cédés, pour la partie non pilonnée, à un ou plusieurs soldeurs professionnels),
• les livres audio.

Source : Guide de déclarations pour les Organismes de prêt Sofia, p. 5

6) Déclaration à la Sacem

Il n’est pas nécessaire de réaliser de déclaration à la Sacem, à moins que vous n’ajoutiez de la musique (sous droit patrimonial) à vos enregistrements.

 

Pour en savoir plus sur la Sacem, vous pouvez contacter votre délégation régionale :

SACEM NANCY

dl.nancy@sacem.fr

Sébastien AIGUIER

Tel: 0369672660

 

Veuillez noter que cette réponse n'a pas de valeur juridique.


 

Pour aller plus loin :