
Vous souhaitez savoir s’il est légal ou autorisé, et dans quel cadre, pour une BU de donner ses livres ou périodiques désherbés à une école, lycée ou université privée ou consulaire.
Le manuel Désherber en bibliothèque indique pages 121-122 les conditions de don dans le domaine privé :
Le don d’ouvrages retirés des collections courantes est une pratique commune (et ancienne) dans les bibliothèques. Avant 2006, l’appartenance de la plus grande partie des fonds au domaine public rendait toutefois cette pratique particulièrement complexe. On pouvait espérer sur ce point que le changement d’optique opéré par le CG3P, faisant passer la quasi-totalité des collections courantes des bibliothèques dans le domaine privé, aiderait à clarifier la question des dons, ainsi que celle des échanges. Ce n’est malheureusement pas le cas. Le principe retenu par le nouveau Code est en effet celui d’une prohibition du don, avec quelques exceptions au périmètre restreint. La faculté de céder à l’amiable ou d’échanger des biens mobiliers n’est prévue dans le Code que pour ceux appartenant au domaine public (articles L3112-1 à 3 ).
Pour les biens appartenant à l’État, l’article L3211-18, 1er alinéa, du CG3P interdit explicitement la cession gratuite ou à un prix inférieur à la valeur vénale du bien. Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de la vente. Cependant, l’article L3212-2 introduit, pour les biens meubles, deux dérogations : peuvent être réalisées gratuitement les cessions de biens dont la valeur (unitaire) n’excède pas un plafond fixé en Conseil d’État, « à des États étrangers dans le cadre d’une action de coopération » (alinéa 1), ainsi que les cessions « à des associations relevant de la loi du 1er juillet 1901 […] et dont les ressources sont affectées à des œuvres d’assistance » (alinéa 2).
La récente LOI n° 2021-1717 du 21 décembre 2021 relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique stipule à son Article 13 :
La sous-section 2 de la section 2 du chapitre II du titre Ier du livre II de la troisième partie du code général de la propriété des personnes publiques est complétée par un article L. 3212-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 3212-4.-Les documents appartenant aux bibliothèques de l’État, de ses établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs groupements ne relevant pas de l'article L. 2112-1 et dont ces bibliothèques n'ont plus l'usage peuvent être cédés à titre gratuit à des fondations, à des associations relevant de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association mentionnées au a du 1 de l'article 238 bis du code général des impôts et dont les ressources sont affectées à des œuvres d'assistance ou à des organisations mentionnées au II de l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire. Par dérogation aux articles L. 3212-2 et L. 3212-3 du présent code, ces documents peuvent être cédés à titre onéreux par ces fondations, associations et organisations. »
À la lecture de ces textes, nous comprenons que le don des collections désherbées est autorisé à destination d’États étrangers dans le cadre de coopération, d’associations dont les ressources sont affectées à des œuvres d'assistance ou des organisations relevant du champ de l'économie sociale et solidaire.
Dans votre cas, il ne nous semble pas que le don d’ouvrages désherbés à des organisations d’enseignement, bien que non spécifiées en tant que telles, soit contraire à l’esprit de la loi :
La jurisprudence actuelle semble admettre la possibilité pour des personnes publiques de céder des biens à titre gratuit ou à un prix inférieur à leur valeur, lorsque cette cession est justifiée par des motifs d’intérêt général.» [...]. S'agissant de tels dons à des personnes morales privées, on peut ajouter que la valeur vénale unitaire résiduelle très faible de la quasi-totalité des objets cédés, plaide également pour une interprétation moins stricte de l’interdiction formulée par le Code, laquelle semble être essentiellement un garde-fou contre tout risque de léser les intérêts de la personne publique.
Source : Désherber en bibliothèque : manuel pratique de révision des collections. sous la direction de Françoise Gaudet et Claudine Lieber [3e édition]. Éd. du Cercle de la Librairie, 2013, page 123.
Notre service n’étant pas spécialiste du droit, nous vous conseillons toutefois de vous tourner vers des experts du domaine pour en avoir le cœur net.
Quoi qu’il en soit, la décision de donner ces ouvrages doit être formalisée par une délibération du Conseil d’administration de l’université, après passage en Conseil documentaire :
Dans tous les cas, pour que les documents puissent être aliénés, une délibération de l’instance compétente est indispensable : c’est la traduction réglementaire d’une décision qui, successivement, cesse d’affecter l’ouvrage au service de la bibliothèque, le retire des collections de celle-ci, autorise sa vente ou sa destruction et prend acte de l’aliénation, dont l’effet est de sortir définitivement l’objet du patrimoine de la collectivité propriétaire.
Source : Désherber en bibliothèque : manuel pratique de révision des collections. sous la direction de Françoise Gaudet et Claudine Lieber [3e édition]. Éd. du Cercle de la Librairie, 2013, page 121
Veuillez noter que cette réponse n’a pas de valeur juridique.
Pour aller plus loin :
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« Dons et échanges dans le cadre du désherbage. » de Dominique Barrère. Bibliothèque(s), octobre 2008.