
En tant que référent de secteur en bibliothèque départementale, une bibliothèque de votre réseau vous interroge sur la possibilité de céder l’une de ses salles pour la tenue de cours d’anglais payants effectués par un tiers. Comme il s’agit d’une activité professionnelle, se déroulant pendant les temps d’ouverture de la bibliothèque, vous vous interrogez sur la légitimité d’une telle demande dans un établissement public. Pour finir, vous précisez que cette forme de privatisation à des fins lucratives des espaces de la bibliothèque n’est pas abordée dans le règlement intérieur.
En préambule, nous tenons à vous informer que notre réponse n’a aucune valeur juridique.
Nous vous proposons donc quelques pistes pour permettre aux professionnels de votre réseau de répondre à leur tutelle.
Vous précisez dans votre question que la demande provient de la mairie. Or, en tant que tutelle de la bibliothèque, la mairie valide le règlement intérieur de la bibliothèque. Dans ce document, il peut être décidé de proposer à titre onéreux (ou non) l’occupation ou la location des salles de la bibliothèque pour des activités privées lucratives (cours, séminaires…). Les conditions de location devront alors être précisées (horaires, tarifs, conditions...). Cette décision devra être approuvée par le Conseil municipal en accord avec les responsables de la bibliothèque.
Les personnels des bibliothèques peuvent s’appuyer, pour discuter avec leur tutelle des conditions d’accès aux salles à titre privé pour des activités lucratives, sur les textes suivants :
À titre informatif, la location des salles des bibliothèques est une réalité depuis déjà quelques décennies. En effet, en 1994 le BBF abordait les rapports entre bibliothèques et économie : Les bibliothèques saisies par l'économie. Dans l’article Les budgets des bibliothèques publiques : du désir à la réalité, les auteurs énumèrent les différents types de recettes :
D'autres types de recettes peuvent exister : amendes, ventes de publications, entrées payantes à des expositions, locations de salles... 651 bibliothèques ont en 1991 réalisées de telles recettes, pour un montant total de 20 MF, dont on a du mal à croire qu'il puisse couvrir les coûts des publications ou des expositions par exemple.
Source : Les budgets des bibliothèques publiques : du désir à la réalité. Dominique Arot et Sylvie Fayet IN Bulletin des bibliothèques de France (BBF), 1994, n° 3, p. 20-29.
Et récemment, en février 2024, dans l’étude détaillée de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locale est évoqué également la location de salles de la bibliothèque, dans le volet recettes :
Encadré : Face à ces dépenses, quelles recettes ?
Des recettes tarifaires fréquentes mais faibles
D’après les comptes de gestion des communes en 2022, 91% des communes de notre échantillon inscrivent des recettes de fonctionnement pour leurs bibliothèques. Les recettes tarifaires sont les plus fréquentes, puisque 83% des communes de l’échantillon en perçoivent. Ces recettes tarifaires correspondent principalement aux inscriptions et abonnements payants pour pouvoir emprunter des documents en bibliothèques, mais elles peuvent aussi correspondre à d’autres ventes de biens et services réalisées par les bibliothèques comme les ventes d’ouvrages, ou la location d’espaces au sein de la bibliothèque.
Source : Cap sur les coûts de fonctionnement des bibliothèques municipales [pdf] p. 14. OFGL février 2024, n°23
En guise de conclusion, si la pratique de la location de salles d’une médiathèque est tout à fait possible, il n’en demeure pas moins qu’elle doit être encadrée et discutée avec les professionnels des bibliothèques dont le rôle est de défendre les principes de l’accès aux locaux et aux services de manière universelle.
Aller plus loin :